Un printemps inachevé

De retour d’un séjour d’une semaine en République dominicaine au cours duquel j’ai lu le Tome II de la biographie de Claude Léveillée publiée chez Art Global sous la plume de Marie-Josée Michaud, j’ai cru intéressant de vous partager un passage significatif dans la carrière de Claude Léveillée, à savoir sa rencontre avec Marcel Dubé, particulièrement un épisode datant de juillet 1980.

C’est au début des années ’60 que Marcel Dubé rencontre pour la première fois Claude Léveillée en tant que spectateur assidu chez Bozo. Dubé décrit le pianiste en ces termes :

« Chez Bozo, lorsque Claude apparaissait au piano, il était d’une telle timidité, d’une telle modestie, fragile, incertain de plaire, ça me touchait énormément. »

Et Dubé, en bon semeur de récoltes foisonnantes, a su veiller au grain :

« Son œuvre de dramaturge est aujourd'hui indissociable de l’œuvre musicale de Claude Léveillée. L’un mouille les mots de son encre, l’autre y trempe sa musique. Dubé et Léveillée sont frères d’encre. »

Nous sommes le 2 juillet 1980. Depuis longtemps, Dubé et Léveillée caressent le rêve de « créer le grand truc » en collaboration. Les spectateurs de la salle Louis-Fréchette du Grand Théâtre de Québec vont assister au projet le plus ambitieux du tandem Dubé-Léveillée.

Grâce au Comité organisateur des Rencontres francophones de Québec, dont le thème tourne autour de « Questionnement 80 », les deux artistes mettent à profit leur talent respectif en créant « Un printemps inachevé », un poème symphonique d’une envergure phénoménale mettant en présence 110 artistes sur scène.

Six semaines avant la première du spectacle, une majorité de Québécois avait refusé le projet de souveraineté-association proposé par l’équipe de René Lévesque. À travers la poésie et la musique, les souverainistes se consolaient et posaient un baume sur une blessure encore toute fraîche.

« Dans la marche d’un pays vers son identification, il y a certaines heures graves, et il arrive que l’une d’elles sonne au printemps, d’où un printemps inachevé. Mais rien de ce qui est né ne doit mourir et toute promesse doit se réaliser un jour. Le germe de la liberté ne s’embaume pas, le cri d’espérance ne peut toujours se taire et il n’y a pas de saisons mortes ; il ne peut y avoir qu'un printemps inachevé… »

Pour Dubé et Léveillée, cette œuvre représentait leur façon de dire aux Québécois « à la prochaine fois »… « Le printemps est semence, l’idée va germer un jour prochain. À quand la récolte ? »

vigile.net tribune libre 5 décembre 2011
quebechebdo 6 décembre 2011



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