Prendre à bras-le-corps l’animal politique
Dans l’hypothèse fort réaliste d’un déclenchement d’élections au mois d’août, les associations étudiantes se doivent de se pencher sur la meilleure stratégie à adopter pour contrer les effets outranciers de la loi 78 du gouvernement Charest et faire en sorte que le carré rouge ne meure pas au feuilleton des annales de la scène politique québécoise.
Au cours des dernières semaines, plusieurs commentaires ont fait état, et à raison, des intentions de Charest de faire porter l’odieux du climat tendu au Québec sur les épaules des étudiants et tirer profit de la sorte de ses politiques prônant la loi et l’ordre au bénéfice du bien-être de l’ensemble des citoyens, une attitude qui semble profiter au gouvernement qui continue de récolter la sympathie d’une bonne partie de la population si on se fie aux derniers sondages.
À titre d’illustration de tels commentaires, je retiens celui de Réjean Bergeron dans son opinion publiée le 11 juillet dans Le Devoir sous le titre « Carré rouge : maintenant, on fait quoi ? » dont voici un extrait :
« Alors, quelle stratégie les associations étudiantes vont-elles adopter lors de la reprise des cours au mois d’août ? Vont-elles répéter les mêmes tactiques qui consistent à bloquer l’entrée des cégeps et des universités et ressortir dans la rue avec une loi 78 toujours en vigueur ? Ce serait là, à mon avis, une stratégie risquée qui permettrait au gouvernement Charest de marquer des points dans l’opinion publique, augmentant ainsi ses chances de se faire réélire.
Le mouvement de contestation doit penser stratégie et se montrer plus intelligent que son adversaire. Le carré rouge, l’indignation, les casseroles et les manifestations monstres représentent de merveilleux symboles, mais ils ne suffisent plus dans le contexte actuel. Je sais, plusieurs contestataires méprisent la politique, ils préfèrent s’en tenir à distance, bien drapés du voile de la Vertu et des impératifs catégoriques.
Mais de grands principes ne changent pas le monde s’ils ne s’incarnent pas dans l’action à travers les institutions en place, même si c’est pour les changer. C’est pourquoi le mouvement de contestation doit dorénavant prendre à bras-le-corps l’animal politique, occuper la scène électorale à la manière d’un cheval de Troie afin de faire changer les choses de l’intérieur. »
Pour « prendre à bras-le-corps l’animal politique », M. Bergeron propose, entre autres moyens, de s’assurer que chaque étudiant s’inscrive sur la liste électorale et se présente aux urnes, s’implique concrètement dans l’association politique de sa circonscription et que les associations étudiantes utilisent les médias sociaux comme outils de communication.
Même si je juge pertinente une telle démarche qui aurait sans aucun doute un effet positif sur le terrain électoral, je crois qu’elle ne doit pas contrecarrer la force mobilisatrice engendrée par les manifestations de la rue dont le mérite est de ramener le débat au niveau du citoyen et qui demeurent encore, selon moi, la meilleure stratégie pour faire résonner le mécontentement de la population envers le gouvernement Charest.
En conclusion, je dis oui à l’implication sur le terrain tout en persistant dans le tintamarre des casseroles, à défaut de quoi, le carré rouge risque de servir les intérêts des « rouges » pour qui le « terrain » est traditionnellement leur champ de bataille de prédilection !
vigile.net tribune libre 11 juillet 2012
quebechebdo 12 juillet 2012 "Quelle stratégie les étudiants doivent-ils adopter au mois d'août?"
Henri Marineau

