Le parlement de la rue
L’un des avantages collatéraux majeurs qu’aura engendré le conflit étudiant réside, à mon sens, dans le fait que le parlement, le véritable forum où s’est tenu le débat social suscité par les étudiants, s’est déplacé dans la rue, là où des citoyens de toutes allégeances ont pu débattre des enjeux de cette crise.
Dans un article que je publiais sur cette tribune en date du 2 mai 2012 sous le titre « Le Québec ne sera jamais plus le même », je m’exprimais en ces termes :
« Nul ne peut prédire l’issue de ce combat entre la jeunesse québécoise et le gouvernement Charest…Toutefois, peu importe ce qu’il adviendra, un fait est indéniable, aux lendemains de ce conflit, le Québec ne sera plus jamais le même !
À mon sens, nous assistons au début d’un temps nouveau, à une véritable révolution sociale et culturelle, non pas « tranquille », mais « citoyenne », animée du feu qui ne peut plus s’éteindre…un feu ardent qui va se propager, pour les années à venir, dans tous les recoins de la société québécoise. »
Un argumentaire que Philippe Ducros, dans son Opinion parue dans Le Devoir du 30 mai sous le titre « Nous sommes immenses », reprend sensiblement en ces mots :
« Malgré les lacrymogènes, malgré les matraques et les arrestations massives, nous redéfinissons le monde. Au lieu de subir une fois de plus l’asservissement néolibéral, nous sommes en train de forcer peu à peu l’Histoire à faire le prochain pas, à franchir les barricades des idées préconçues du sacro-saint capitalisme débridé. »
Le parlement « traditionnel » où des élus se croyant mandatés pour gérer l’État unilatéralement selon leurs principes ou leurs convictions personnelles sans référer à leurs commettants, à savoir les citoyens, est maintenant relégué dans le placard avec les squelettes des vieilles politiques carriéristes et démagogiques. Les casseroles ont sonné le glas du néolibéralisme.
À partir de maintenant, les élus devront apprendre à parlementer, à dialoguer avec le peuple québécois, à descendre dans la rue, là où les étudiants ont amené le débat, là où le véritable pouvoir vient de clamer haut et fort que ni les médias ni la classe politique ne pourront dorénavant l’ignorer.
Elle est là la grande victoire du « printemps érable » québécois…dans cet éveil sonné par une jeunesse allumée qui nous ouvre la voie à une société plus équitable, qui nous invite à prendre notre juste place dans les débats qui touchent l’avenir de la société québécoise.
quebechebdo 30 mai 2012
vigile.net tribune libre 30 mai 2012
Henri Marineau

