Fermeté et vigilance obligent
Selon les dernières données de Statistique Canada, plus de 200 000 immigrants ne parlent pas français. En termes clairs, un immigrant sur cinq au Québec ne peut tenir une discussion en français. C’est ce qui ressort des données de l’Enquête nationale auprès des ménages (ENM), effectuée en 2011 qui dressent notamment un portrait des immigrants et des langues qu’ils maîtrisent. Parmi les immigrants vivant au Québec, 160 000 ont déclaré ne parler que l’anglais, et 43 000 ne maîtrisent aucune des deux langues officielles du Canada.
Toujours selon ces mêmes données, parmi ces immigrants qui ne maîtrisent pas le français, environ 30 000 sont arrivés récemment, soit depuis 2006, ce qui laisse croire que leur non-compréhension de la langue est attribuable à leur arrivée récente au pays, mais 35 000 d’entre eux qui ont immigré ici dans les années 1990 ne parlent toujours que l’anglais ou une autre langue.
Seule note encourageante au tableau, il semble que la loi 101 ait produit des effets positifs puisque, chez les nouveaux arrivants allophones au Québec, davantage d’entre eux apprennent le français avant l’anglais. Pour arriver à de telles conclusions, Statistique Canada demande aux immigrants laquelle des deux langues officielles du Canada ils ont appris à parler en premier et, parmi les immigrants arrivés avant 1996, 33 % se tournaient alors vers l’anglais, une proportion qui n’est plus que de 20 % dans les dernières années. Et l’inverse est vrai pour le français alors qu’en 1996, 46 % apprenaient le français d’abord et la proportion n’a pas cessé d’augmenter pour atteindre 58 % en 2011.
Par ailleurs, toujours selon les données de Statistique Canada, au chapitre de l’immigration, une compétence constitutionnelle partagée entre le Parlement canadien et les législatures provinciales, près d’une personne sur cinq au pays appartient à une minorité visible alors qu’au Québec cette proportion se chiffre à 10 %, un pourcentage qui atteint 20 % à Montréal où les Noirs constituent le groupe de minorités visibles le plus important, devant les Arabes et les Latino-Américains. Au Québec, c’est la municipalité de Brossard, sur la rive sud de Montréal, qui a la population la plus diversifiée alors que 38 % de ses citoyens appartiennent aux minorités visibles, suivie de Dollard-des-Ormeaux, sur l’île de Montréal, avec 35 % de ses résidents.
Dans l’ensemble du Canada, le Québec reçoit ainsi sa part d’immigration de groupes de minorités visibles. « Mais ils viennent de pays différents du reste du Canada », indique François Nault, directeur de la division de statistique sociale à Statistique Canada. « Au Québec, on va avoir plus d’Arabes, de Latino-Américains et d’Africains » en raison du français qui est parlé dans leur pays d’origine, ou d’une langue apparentée, comme l’espagnol, précise-t-il.
En campagne électorale, le Parti québécois s’était engagé à intensifier les efforts de francisation des immigrants allophones. Les données de l’ENM, même si parfois elles s’avèrent positives, pourront donner au gouvernement un portrait précis de tous ceux qui échappent à son programme de francisation…et du pain sur la planche pour Diane De Courcy, ministre de l’Immigration et des Communautés culturelles et ministre responsable de la Charte de la langue française, qui devra faire preuve de fermeté et de vigilance dans les dossiers "chauds" qui lui sont confiés.
vigile.net tribune libre 9 mai 2013
quebechebdo 9 mai 2013 "Francisation des immigrants au Québec – Fermeté et vigilance obligent"
Henri Marineau

