Tout simplement catastrophique!

24 juin 2024

Cette année, le taux de réussite au premier essai des futurs enseignants au primaire et au secondaire, qui doivent obligatoirement réussir un examen de français, était de 44% seulement à l’Université de Montréal, 39% à l’Université Laval, 29,3% à l’UQAC et 23,3% à l’UQAR. De plus, de nombreux étudiants doivent s’y reprendre à trois, quatre et même cinq reprises. À l’Université Laval, pour ceux qui passent le test pour la cinquième fois, le taux de réussite n’est que de 54%. Tout simplement catastrophique!

Mais que s’est-il donc passé depuis le début du primaire jusqu’à l’université pour que le français de nos élèves québécois soit d’une aussi piètre qualité? Certains «experts» en éducation évoquent la pandémie, un motif qui, selon moi, a le dos bien large. Je suis plutôt d’avis que le français a littéralement perdu ses lettres de noblesse dans nos établissements scolaires. L’enseignement de la grammaire, de la syntaxe et du lexique est devenu une «monnaie rare». La langue française est inutilement compliquée, voire tordue, patriarcale et élitiste, évoquent les futurs enseignants.

Le jour où l’on comprendra que le sens de l’effort fait partie inhérente de la formation de notre jeunesse pavera la voie à la beauté de notre langue et à la fierté de la parler et de l’écrire convenablement avec tous ses «caprices».

Le Soleil (version numérique) 24 juin 2024

Le troisième lien, un choix électoraliste

18 juin 2024

Paradoxalement, la clôture de la session parlementaire à Québec coïncide avec la énième réouverture de la saga sur le troisième lien autoroutier entre Québec et Lévis, et ce, nonobstant le rejet d’un tel projet de la part de la Commission de dépôt et de placement du Québec (CDPQ). Toutefois, les experts de la CDPQ, sans se prononcer sur cette alternative, ouvre la voie à un troisième lien en alléguant la sécurité économique. Il n’en fallait pas davantage pour que la ministre des Transports et de la Mobilité durable, Geneviève Guilbault, saute sur cette opportunité alors qu’il y a un an à peine, elle faisait l’apologie de la solidité du pont Pierre-Laporte et que, de ce fait, le troisième lien n’avait aucune pertinence entre les deux rives reliant Québec et Lévis.

Tout en virement de capot de la part de la ministre. L’inhumation du troisième lien en 2023 se métamorphose en exhumation un an plus tard. L’insécurité du pont Pierre-Laporte devient soudainement un risque pouvant conduire à sa fermeture temporaire ou permanente immédiate obligeant les camions lourds à faire un détour insensé vers le pont Laviolette à Trois-Rivières, une situation qui provoquerait le chaos chez les caquistes et à laquelle il faut immédiatement remédier, et ceci sans aucune étude préalable ni estimation des coûts.

Et les citoyens de la Capitale Nationale dans tout ce tohu-bohu? Où en est rendue leur crédibilité devant les nombreuses tergiversations de ce gouvernement eu égard au troisième lien? Comment interpréter le fait que ce changement de cap se produit deux ans avant les élections de 2026, soit le temps nécessaire pour permettre à la CAQ de peaufiner le projet et de le présenter comme promesse prioritaire de réalisation au cours de la prochaine campagne électorale?

À mon sens, derrière ce énième revirement dans le dossier du troisième lien se cache un choix électoraliste, une décision improvisée de toutes pièces pour permettre à la CAQ de redorer son blason et de remonter dans les sondages… Or, les Québécois sont échaudés, leur crédibilité envers la CAQ est au point mort, et tous ses efforts pour remonter sa cote de popularité sont vains.

vigile.quebec tribune libre 17 juin 2024

Retour à la case départ

13 juin 2024

Le projet d’un réseau collectif structurant de Québec, à savoir un tramway, piloté par l’ex-maire de Québec, Régis Labeaume, est né en mars 2018 quelques mois après la dernière élection municipale qui a porté le maire Régis Labeaume à la tête de la capitale pour un quatrième mandat. La ligne de tramway relierait le secteur Louis-XIV, situé dans l’arrondissement de Charlesbourg, au secteur Le Gendre, dans l’ouest de la ville.

Or, en juin 2024, soit six ans après le dépôt du projet par Régis Labeaume, la Caisse de dépôt et de placement du Québec (CDPQ), après avoir reçu le mandat, par le gouvernement de François Legault, d’étudier et de proposer des pistes de projets structurants, en arrive à la même conclusion que Régis Labeaume, y compris le tracé proposé en 2018.

Le moins que l’on puisse dire, c’est que le projet de tramway dans la Capitale nationale revient à la case départ, et, de surcroît, contribue à l’ajout de milliards $ supplémentaires puisés dans les poches des contribuables.

Mais que s’est-il donc passé pour que le projet de tramway de Québec fasse du surplace pendant six longues années? Nonobstant le fait que les élus municipaux et provinciaux se soient renvoyé la balle à n’en plus finir, des comités de citoyens s’opposant au tramway ont mené une campagne féroce contre la construction du tramway.

Enfin, concernant le troisième lien entre Québec et Lévis, la CDPQ se prononce contre sauf s’il est prouvé qu’il contribuera à l’expansion économique de la région. Rien de novateur non plus dans ce dossier qui demeure à son état embryonnaire. De fait, il semble que la vie politique québécoise se soit campée obstinément dans un sempiternel recommencement!

vigile.quebec tribune libre l2 juin 2024 


 

Un écran de fumée?

13 juin 2024

Dans son allocution au Salon bleu de l’Assemblée nationale à l’occasion de la fin de la session parlementaire, le premier ministre a surpris les partis d’opposition en annonçant la création d’un «comité consultatif sur les enjeux constitutionnels du Québec au sein de la fédération canadienne» qui aura pour mission de trouver des façons d'accroître l'autonomie de la province à l'intérieur du Canada.

Or, de toutes les réactions des chefs de partis d’opposition, je retiens celle du chef du PQ, Paul St-Pierre Plamondon: «Comment le premier ministre peut-il à la fois constater l'existence d'un cul-de-sac pour le Québec dans le Canada et simultanément vouloir que la nation québécoise retourne dans ce cul-de-sac-là? C'est une question fondamentale, car le Canada est irréformable, et je sais que, dans le fond de lui-même, le premier ministre le sait très bien».

De fait, aussi loin que l’on remonte dans le temps, les tentatives du Québec d’augmenter leurs pouvoirs au sein de la Confédération canadienne, ont toutes échoué lamentablement. Et j’ajouterais que ce n’est sûrement pas avec un premier ministre fédéral aussi enraciné dans la centralisation des pouvoirs que le Québec réussira à maquer des points.

À mon sens, en sortant ce lapin de son chapeau à la toute fin de la session parlementaire, François Legault a choisi de mettre un baume sur une session éprouvante qui a vu la CAQ chuter drastiquement dans les sondages. Conséquemment, la création de ce comité d’experts n’est qu’un écran de fumée destiné à camoufler le paysage pour le moins lamentable, voire désastreux, de la dernière session…et a laisser les électeurs sur une note positive à la veille de la période des vacances.

vigile.quebec tribune libre 12 juin 2024

L’école d’autrefois

7 juin 2024

Lorsque je suis entré à l’école pour la première fois en septembre 1954, j’ai été frappé par le calme qui y régnait malgré le grand nombre de nouveaux élèves qui s’y trouvaient. J’ai ressenti un climat quasi religieux semblable à celui qui m’imprégnait lorsque mon père nous amenait faire notre pèlerinage annuel à la basilique Sainte-Anne-de-Beaupré.

Je savais que l’école était un lieu d’apprentissage et que je devais conserver toute mon attention dans la classe pour profiter de toutes les connaissances de notre enseignante. Le silence était érigé en principe sacré dans la classe, et malheur à celui qui y dérogeait qui devenait de facto susceptible d’écoper d’une sanction exemplaire.

Lorsque je franchissais la porte de l’école, je me sentais dans un autre monde à l’écart des soubresauts de la société. Aujourd’hui, le «sanctuaire» scolaire a disparu, envahi par le monde extérieur. L’école a perdu ses lettres de noblesse au profit d’un lieu où l’apprentissage a fait place prioritairement au bien-être des élèves vers qui l’enseignant dirige toute son attention, un changement de paradigme qui en est venu à dénaturer le rôle premier de l’école, à savoir la communication des connaissances à des apprenants.

En écrivant ces mots, mon intention n’est pas de verser dans une mélancolie pernicieuse mais plutôt de nous interroger sur les effets collatéraux engendrés par le chemin qui nous a conduits à un changement aussi draconien eu égard au rôle de l’école. À mon avis, il est impérieux de recentrer l’école sur sa vocation première et de replacer l’élève dans un cadre où sont placés en priorité le sens de l’effort et la rigueur intellectuelle indispensables à un sain climat d’apprentissage.

vigile.quebec tribune libre 6 juin 2024

Le silence est d’or

7 juin 2024

À la veille de la rentrée parlementaire en janvier 2024, un sondage donne à François Legault et à ses troupes leur pire résultat dans les intentions de vote depuis l’hiver 2016, alors qu’ils étaient dans l’opposition. À l’échelle provinciale, le PQ obtient 32 % des intentions de vote, comparativement à 21 % pour la CAQ. En octobre 2022, quand il a repris le pouvoir pour un second mandat, la CAQ avait obtenu 41 % des suffrages.

Aux yeux de François Legault, qui a demandé à ses députés de la discipline après une année 2023 marquée par les controverses, notamment la hausse du salaire des élus, la défaite cuisante dans Jean-Talon, la subvention pour la venue des Kings de Los Angeles au centre Vidéotron, la grève interminable en éducation, etc, ce nouveau coup de sonde donne le ton à la nouvelle année politique qui débute à Québec. Dorénavant, les élus caquistes éviteront ce que François Legault qualifie de «distractions».

De son côté, le premier ministre gardera le silence eu égard aux questions des journalistes qui lui sont posées dans le couloir conduisant au salon Bleu. Or, contre toute attente, un dernier sondage Léger donne au PQ 32% des intentions de vote contre 25% à la CAQ, soit une hausse de 3% sur le dernier sondage.

La CAQ de François Legault aurait-elle réussi à juguler l’hémorragie au même moment où François Legault a pris la décision de ne plus répondre aux questions des journalistes? Si tel est le cas, force est de constater que, pour monter dans les sondages, il vaut mieux s’en tenir à l’adage qui dit que le silence est d’or.

vigile.quebec tribune libre 6 juin 2024

Jean-Pierre Ferland, toujours vivant

3 juin 2024

Dans la foulée d’une kyrielle de téléspectateurs, j’ai suivi avec intérêt les funérailles nationales de Jean-Pierre Ferland sur mon petit écran. Une cérémonie digne des grands personnages de la scène qui aura marqué l’imaginaire des Québécois pendant des décennies.

Les témoignages de sa conjointe, de sa fille et de son fils étaient animés d’une complicité touchante avec le disparu à tel point que nous entrions bien malgré nous en relation intime avec Jean-Pierre. Le sourire légendaire du «faiseux de chansons», comme il se plaisait lui-même à se définir, rayonnait dans toute l’enceinte de la basilique-cathédrale Marie-Reine-du-Monde de Montréal, convertie pour l’occasion en un hommage grandiose à monsieur Jean-Pierre Ferland.

Parmi les prestations entendues lors de la cérémonie, je retiens une de ses chansons fétiche Avant de m’assagir dans laquelle Jean-Pierre Ferland dépeint avec vigueur toute sa soif de vivre en ces mots: «Je veux mourir ma vie/Et non vivre ma mort», un amalgame de mots avec lesquels lui seul avait cette capacité magistrale de nous surprendre et de nous émerveiller.

Le 1er juin 2024, à l’aube de ses 90 ans qu’il aurait fêté le 24 juin, nous avons pu revivre un immense pan de la richesse des textes de ce géant des mots qui avait ce don extraordinaire de nous faire voyager dans son univers. Jean-Pierre Ferland, un personnage plus grand que nature, sera toujours vivant dans l’inconscient collectif des Québécois qui fredonneront encore longtemps les paroles de ses chansons.

Merci à toi, Jean-Pierre, de nous avoir transportés si généreusement pendant des décennies dans ton monde imaginaire. Repose en paix maintenant, tu le mérites amplement!

vigile.quebec tribune libre 2 juin 2024
 

La chasse aux sorcières

1 juin 2024

Depuis son arrivée fracassante sur la scène politique américaine, Donald J. Trump n’a cessé de jouer le personnage de la victime contre les attaques incisives de ses adversaires en les qualifiant de chasses aux sorcières. Selon Google, «la victimisation désigne l’attitude par laquelle une personne se pose en victime dans le but conscient ou inconscient de susciter chez autrui le sentiment de pitié ou de culpabilité».

Or, là où le bât blesse avec le plus d’acuité, c’est le fait que cette comédie digne des grands classiques percole avec conviction auprès de ses supporteurs qui persistent à lui octroyer leur appui sans condition. À preuve, la décision unanime des douze jurés dans un procès au criminel faisant de Donald Trump un condamné ne semble aucunement faire baisser son avance en tête de la course à la présidence des États-Unis.

Au contraire, cette condamnation attise davantage la sympathie de ses troupes qui y voient une chasse aux sorcières de la part de ses détracteurs. L’image de la victime reprend instantanément le devant de la scène sans coup férir.

Or, comment expliquer ce phénomène surréaliste? À mon avis, une forte partie de l’électorat américain, notamment les républicains, sont embrigadés dans un scénario western où Trump joue le rôle du «bon» contre les «méchants» démocrates. À n’en pas douter, cette stratégie porte ses fruits. À cet effet, quelle que soit la sentence à laquelle Trump sera condamné, ses fans persisteront à l’appuyer jusqu’au 5 novembre 2024.

Le Devoir 1er juin 2024
vigile.quebec tribune libre 2 juin 2024
Le Soleil (version numérique) 3 juin 2024
 

La gestion de classe, un enjeu primordial

29 mai 2024

La gestion de classe incarne un enjeu essentiel à la communication des connaissances auprès des élèves. À cet effet, un article de la chargée de cours, Pascale Bourgeois, de l’UQÀM, dont voici un extrait, s’avère très révélateur. «… un changement paradigmatique s’est opéré en éducation au cours du XXe siècle, nous faisant passer d’une éducation centrée sur les connaissances à une éducation centrée sur l’enfant, collée sur ses besoins, ses intérêts individuels. L’enseignement axé sur la maîtrise des connaissances aux termes d’effort, de rigueur et de discipline est, depuis longtemps déjà, dépassé.»

À cet effet, tout au long de mes quelque 30 années d’expérience en éducation, il m’a été donné l’occasion de rencontrer plusieurs nouveaux enseignants dont leur approche au sujet de la gestion de classe ouvrait la porte à des débordements en relation avec les comportements des élèves. Je veux parler ici des jeunes enseignants qui, dans le but de s’attirer la sympathie des jeunes, favorisaient une approche égalitaire, espérant ainsi tisser des liens privilégiés avec eux. Or, cette approche «centrée sur l’enfant» dégénérait rapidement en une cacophonie générant un climat d’apprentissage défavorable, voire impossible.

Qu’on le veuille ou non, la gestion de classe se retrouve dans le prolongement de la ligne d’autorité dans la relation enseignant-élève. En ce sens, il serait utopique que l’enseignant soit considéré comme l’ami de ses élèves, une approche qui viendrait contrecarrer un sain climat d’apprentissage.

Dans ces circonstances, les approches à privilégier concernant la gestion de classe doivent absolument être abordées lors de la formation des futurs enseignants. À mon sens, les jeunes, quoique rébarbatifs à toute forme d’autorité, se plieront volontiers aux doléances des enseignants qui exploitent l’approche de la main de fer dans un gant de velours.


vigile.quebec tribune libre 28 mai 2024
 

Et les patients?

29 mai 2024

La saga que se livrent actuellement les omnipraticiens et le ministre de la Santé, Christian Dubé, eu égard à l’abolition de la prime de 120$ versée aux médecins au moment où ils prennent en charge un patient «orphelin» est en train de dégénérer en un champ de bataille agressif, voire virulent. Difficile, dans un tel scénario, de déterminer qui sont les «bons» et qui sont les «méchants».

D’un côté, le ministre qui refuse de négocier «avec un gun sur la tempe», et de l’autre, les médecins généralistes qui allèguent l’odieux de la décision unilatérale du ministre. Et, pris en otages dans cette guerre de pouvoir, ce sont quelque 5700 patients qui ont survécu à la purge des médecins par rapport aux 18 398 en liste la semaine dernière qui attendent depuis des mois un rendez-vous avec un omnipraticien.

Dans ces circonstances, les médecins généralistes donnent carrément l’impression de contourner le guichet d’accès à la première ligne (GAP) pour une prime, disons-le, dérisoire de 120 $ par patient, et le ministre use de son pouvoir éhontément en abolissant cette prime sans aucune négociation préalable.

Depuis quelques années, la période d’accès à un médecin de famille a atteint des proportions sans précédent, voire même inhumaines pour des milliers de patients qui souffrent le martyre quotidiennement. C’est dans un tel tohu-bohu que la nouvelle PDG de Santé Québec, Geneviève Biron, s’est engagée à désengorger l’accès aux médecins de famille et à placer le patient au centre de ses priorités. Reste à savoir si elle et son équipe réussiront à gagner leur pari…

vigile.quebec tribune libre 28 mai 2024
Le Devoir 29 mai 2024