Éclosion

11 mars 2007

Les yeux rivés sur la page blanche
Prête à recevoir l'encre du crayon
Ma main se libère de son bâillon
Et revêt son habit du dimanche

Métaphores, ellipses et comparaisons
S'intègrent tout doucement dans mes vers
Agençant harmonieusement en paires
Des mots rimés comme saison et maison

J'écris, je biffe et recommence
Au rythme d'une lente gestation
Mes idées se terrent en incubation
Attendant qu'émerge la semence

Le texte germe petit à petit
Enrichi par des mots mis en marge
À la manière de riches bagages
Lui insufflant une forme de vie

Je m'arrête quelques instants, je relis
Partant de l'alpha jusqu'à l'oméga
Je change quelques mots ici et là
Enfin ma main a rejoint mon esprit

Toi…mon amie fidèle

11 mars 2007

Toi mon amie fidèle
Tantôt silencieuse
Tantôt pernicieuse
Avec toi je m'éveille…

Tu trottes dans ma tête
Tantôt laborieuse
Tantôt paresseuse
Telle l'insatiable bête…

Sans cesse tu me harcèles
Tantôt capiteuse
Tantôt minutieuse
Semant mots en parcelles…

À bout de souffle je m'assois
Et en ta compagnie
J'entre au-dedans de moi
Pour saisir l'inédit…

Ma main suit le crayon
Qui glisse sur le papier
Mes yeux se laissent guider
Au gré de l'abandon…

Poésie mon amie
Toi mon amie fidèle
Sans cesse tu me harcèles
Pour saisir l'inédit

Une fleur à jamais refermée

11 mars 2007
J’avais un père que je voyais rarement
Un père voyageur très souvent absent
Et lorsqu’il était là
Il ne me parlait pas

Son dernier voyage fut précipité
Je n’ai pas eu le temps de lui exprimer
À quel point je l’aimais
Dans ma tête un regret…

Pourquoi papa es-tu resté
Une fleur à jamais refermée?

À mon tour d’être père de deux enfants
Un père divorcé donc souvent absent
Pourtant lorsqu’elles sont là
Je ne leur parle pas

J’ai peur de partir trop tôt à regret
Et de ne pouvoir leur dire à jamais
Combien je les aimais
À leur tour elles diraient…

Pourquoi papa es-tu resté
Une fleur à jamais refermée?

Les années ont passé

11 mars 2007
Lundi gris de départ
Étirant les écarts
Une vie de voyage
Le fils sur le rivage

Quand le père est mort
Le fils a quitté le port
Emportant son regard
Gravé dans sa mémoire

Les années ont passé
Dans sa tête le souvenir
De son père un sourire
Marqué par les années

Des années de silence
Empreintes de turbulence
Le fils a cheminé
Cherchant la vérité

Or un jour de tempête
Dans le brouillard une crête
D’où brillait une lumière
Qui devint conseillère

Les années ont passé
À l’aube d’une nouvelle page
Le fils est devenu sage
Marqué par les années

Le pêcheur

11 mars 2007
Partant très tôt le matin
Sa canne à pêche à la main
Il arpente le long sentier
Le menant à son gibier

Tout près d’un arbre géant
Il appâte son guet-apens
Et d’un gracieux mouvement
Dépose sa ligne dans l’étang

Entouré de maringouins
Fouinant ses moindres recoins
Il s’allume une cigarette
Faisant fuir tous ces insectes

Soudain la corde se raidit
Et son poignet réagit
D’un coup sec il sort sa proie
Qui sans succès se débat

Il l’empoigne dans ses mains
La ramène sur sa poitrine
Désamorce sa gueule fine
Et l’ensache avec grand soin

Bien planté sur une roche
Une main dans sa poche
Passe le temps lentement
Tournoie la ligne rondement

Puis au bout de quelques heures
Empli de son élixir
Il reprend son p’tit bonheur
Sur ses lèvres un sourire

Hymne à ma mère

11 mars 2007
Sa tête sur ma poitrine appuyée
Son dos recourbé par les années
Sa gorge serrée par les sanglots
De tendres mercis en trémolo

Pourtant tant de temps
Là à mes côtés
Pour m’encourager
Sans compter son temps

Son corps s’est ankylosé
Son regard s’est attristé
Voilé derrière ses souvenirs
Barricades à tout avenir

Maman, il a fallu que vous en arriviez là
Pour que je découvre enfin à quel point je vous aime
Je suis là près de vous en cette période de carême
Je vous accompagnerai jusqu’à votre dernier pas

Si vous avez besoin d’une oreille pour vous écouter
Si vous avez besoin d’une épaule pour vous appuyer
Sachez que toujours j’accourrai
Un simple signe et j’arriverai

Un jour, Océane

11 mars 2007
Un jour quand tu sauras voir
Et que tes yeux brilleront
À l’éclosion des bourgeons
J’aimerais être un bougeoir

Un jour quand sonnera l'école
Et que tu te heurteras
Aux écueils des aléas
J’aimerais être une boussole

Un jour quand tu auras peur
Et que tes jambes figeront
Devant le fragile pont
J’aimerais être une lueur

Un jour quand naîtra l’amour
Et que ton cœur s’enflammera
Au simple son d’une voix
J’aimerais être un toujours

Un jour quand tu seras mère
Et que ton sang coulera
Dans les veines de l’enfant-roi
J’aimerais être une lumière

Un jour quand tu seras vieille
Et que ton corps flétrira
À la lourdeur de tes pas
J’aimerais être un soleil

Un jour quand viendra la mort
Et que ton souffle répondra
À l'appel de l'au-delà
J'aimerais être une aurore
Commentaire:
"Océane a un merveilleux grand-papa poète! Comme c'est beau ce que vous lui dites!"
Anne Sigier
4 janvier 2011

Les vieux

11 mars 2007
Aux temps lointains de leur enfance
Aux temps jadis où tout petits
Les grands les couvaient dans leur nid
Les vieux ont cru en dame chance

Aux temps de leur adolescence
Vinrent les temps de la turbulence
 Ballottés tels des cerfs-volants
Les vieux ont rencontré les grands

À leur tour ils devinrent grands
À l’écart du monde des petits
Jusqu’au jour où devenus vieux

Ils redevinrent les enfants
D’un monde infiniment petit
Où les vieux ne sont que des vieux

Le couloir

11 mars 2007
Il existe quelque part
Derrière une porte close
Un fatidique couloir
Où l’humain n’est plus que chose

Le temps s’y est arrêté
En quête de son existence
Le temps s’y est arrêté
En quête de sa survivance

Derrière des portes des gens
Recroquevillés dans leur lit
Terrés et ensevelis
Sous leurs souvenirs d’antan

Au fond de ce long couloir
Prise par son cancer de l’âme
Survit ma mère dans le noir
Prisonnière d’un vague à l’âme

Le temps s’y est arrêté
En quête de son existence
Le temps s’y est arrêté
En quête de sa survivance

Le passage

11 mars 2007
Jours de lumière
Nuits de noirceur
Jours de chaumière
Nuits de frayeur

En un lieu retiré du monde
S’égrènent une à une les secondes
Les yeux rivés sur le plafond
Ils apprennent leur dernière leçon

Un lieu où la résignation
S’est substituée à l’espoir
Un lieu où la condamnation
S’est prononcée tel un butoir

Un jardin où fanent les fleurs
Tels de fragiles fétus de paille
Une antre où s’enfoncent les cœurs
Au creux de l’ultime bercail

En un lieu retiré du monde
S’égrènent les secondes
Les yeux rivés sur le plafond
Ils apprennent leur dernière leçon

Jours de lumière
Nuits de noirceur
Jours de chaumière
Nuits de frayeur